La France en dix leçons
# extraits

Le pays

La France partage avec l’Espagne le privilège d’une double ouverture maritime : sur l’océan atlantique et sur la Méditerranée. D’un côté, son regard est tourné vers l’avenir, le monde moderne initié avec les grandes découvertes du seizième siècle ; de l’autre, elle se souvient de ses origines : l’antiquité gréco-romaine, la chrétienté et l’islam présent au Maghreb, à sept cents kilomètres de ses côtes.
La France présente la forme approximative d’un hexagone et c’est souvent par ce terme qu’on la désigne. C’est évidemment dû à un hasard de la géologie, mais cette forme convient au goût des Français pour la rigueur, la géométrie, la rationalité. Cependant, cette rationalité est prise en défaut par quelques fantaisies, comme si un magicien ivre avait tracé les contours de ses côtes. Ces fantaisies se nomment Cotentin, Finistère, Côte d’Azur.
La frontière avec l’Espagne – un des côtés de l’hexagone – est redevable au relief des Pyrénées. Quant aux autres frontières, elles ont été tracées au gré des alliances, des guerres et des traités qui ont émaillé l’histoire de ce pays.
Quelle est son importance géographique ? Environ 550.000 km², ce qui en fait le plus grand pays d’Europe. Philippe II, roi d’Espagne, en s’emparant de la couronne du Portugal, régna sur un territoire plus vaste ; mais cela ne dura qu’une soixantaine d’années.
Les manuels de géographie nous apprennent que la France est le plus grand pays agricole d’Europe. Cet avantage résulte de la présence de vastes plaines propices à la polyculture et à l’élevage.
Une autre caractéristique de la France est sa variété géographique : du nord au sud et de l’est à l’ouest, le voyageur traverse des paysages très différents : plaines, collines, plateaux et montagnes alternent en un patchwork sans cesse renouvelé. Le pays est arrosé par quatre grands fleuves : la Seine, la Loire, la Garonne et le Rhône ; les trois premiers se jettent dans l’Atlantique, le quatrième dans la Méditerranée. Les principaux massifs montagneux sont le massif armoricain, le massif central, les Pyrénées et les Alpes. Les deux plus grandes plaines sont le bassin parisien et le bassin aquitain.
Pour décrire l’Hexagone, je suivrai son tracé, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, en commençant par la Normandie.


La société française

De nombreux ouvrages ont été consacrés à l’étude de la société française. Mon but n’est pas d’en faire la synthèse, tâche ardue qui nécessiterait à son tour plusieurs volumes. L’étude d’une société peut se faire à divers points de vue. On peut la diviser selon les sexes, selon les tranches d’âge, selon les professions, selon les catégories socioculturelles, selon les races, selon les convictions philosophiques ou religieuses. Quelques-uns de ces points de vue seront examinés dans d’autres chapitres, tels que la politique et l’amour. On s’y reportera. Face à l’ampleur de la tâche, je me bornerai à décrire les tendances de la société moderne, en essayant de mettre l’accent sur ce que la société française a de spécifique par rapport aux autres nations européennes. Dans cette étude, je n’ai pas tenu compte des 2 millions de Français résidant à l’étranger. Les habitants des Dom-Tom ne sont pas non plus toujours pris en compte.


La Culture

Culture : « ensemble des usages, des coutumes, des manifestations artistiques, religieuses, intellectuelles qui définissent et distinguent un groupe, une société ».(Larousse)
La France, comme tout groupement de personnes d’une certaine ampleur, possède donc une culture. Dès lors se pose la question : quelle est la spécificité de la culture française ?
Pour y répondre, il faut remonter aux origines de la France. Le Royaume de France s’est formé à partir d’Hugues Capet au dixième siècle. A cette époque, le domaine de la couronne était encore réduit à la portion congrue. Il faudra attendre le douzième siècle pour qu’un sentiment national naisse avec la fidélisation d’un certain nombre de vassaux.
Dans ce processus, la rivalité entre le royaume de France et le royaume d’Angleterre joue un rôle déterminant. Ce n’est qu’au terme de la guerre de Cent ans que le royaume de France est à peu près constitué sous le règne de Louis XI (1461-1492).
Parallèlement, l’Église exerce une influence déterminante sur les esprits. La religion est omniprésente. Chez les pauvres, travailleurs de la terre pour la plupart, la crainte du châtiment éternel est soigneusement entretenue. Les évêques rendent la justice sur leurs propres terres qui sont immenses. Les seigneurs eux-mêmes doivent composer avec cette structure très hiérarchisée qu’est l’Église. Le savoir est détenu par les moines qui le conservent à l’abri des regards, dans les abbayes.
A l’origine de la culture française, nous avons donc un sentiment d’appartenance à une nation, un sentiment religieux profondément enraciné et un savoir non partagé. Ne dit-on pas que la France est la fille aînée de l’Église. ?
Bien entendu, les choses vont évoluer à la Renaissance, avec les grandes découvertes et la Réforme. Mais l’Église. et la Monarchie se partageront le pouvoir pendant plusieurs siècles encore, tandis que le savoir sortira peu à peu des abbayes pour susciter et nourrir les travaux des intellectuels, des savants, des écrivains et des artistes.


L’esprit cartésien et la langue française

Descartes (René) : Philosophe et savant français (1596-1650). Auteur de nombreux ouvrages qui ont marqué la pensée et la connaissance au dix-septième siècle. L’idée la plus répandue de Descartes est « Je pense, donc je suis », vérité première d’où découle tout son système.
Descartes a donné son nom au cartésianisme, expression qui est censée traduire l’essentiel de sa pensée. On peut observer que ce terme a subi au cours des âges un glissement de sens. En effet, alors que le platonisme ou l’hégélianisme font toujours référence à la pensée de Platon ou de Hegel, bien peu de Français connaissent réellement la philosophie de Descartes lorsqu’ils utilisent les termes « cartésianisme » ou « cartésien ». Dans le langage courant, ces mots ont acquis le sens de « logique » ou « fondé sur la raison », ce qui n’est pas faux, mais réducteur.

Plusieurs questions se posent donc : quelle est l’influence de la philosophie de Descartes sur les Français ? Les Français ont-ils l’esprit cartésien ? (…..)

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